(Sous réserve de modification/amélioration)
 

L’axe intermédialité et interactions sociales se concentre sur l’étude des phénomènes de circulation d’un medium à un autre et d’interdépendance entre des formes et modes d’expression artistique dans un contexte politique et social déterminé. Cette approche s’articule nécessairement à une perspective en partie diachronique, qui vise à rendre compte de l’évolution d’une même fabula à travers diverses incarnations artistiques (transmédialité) ; elle prend également acte de l’effacement progressif des frontières et de la hiérarchie culturelle entre œuvre source et œuvre cible (telle qu’elle a été pensée dans le cadre des théories de l’adaptation (Thomas Leitch, Film Adaptation and its Discontents, Baltimore, John Hopkins UP, 2007).
Les cas d’intermédialité (manifestation des mêmes procédés stylistiques sous des formes différentes selon les media) et de plurimédialité (coexistence de plusieurs media à l’intérieur de la même œuvre) pourront également être abordés, dans la continuité des travaux (André Gaudreault et Thierry Groensteen (dirs.), La Transécriture. Pour une théorie de l'adaptation. Littérature, cinéma, bande dessinée, théâtre, clip, Québec, Editions Nota Bene, 1998) qui ont défini ces catégories. Plus généralement, il s’agit de comprendre les phénomènes de dialogues et les influences réciproques entre les arts et les courants esthétiques. Ces phénomènes seront abordés dans le cadre d’études portant sur les adaptations, les manifestations des mêmes courants esthétiques dans des media divers, et les liens entre les arts (transfert d’une forme artistique d’un medium à un autre : par exemple une forme poétique et sa transposition en musique).

Ces recherches pourront se décliner selon les orientations suivantes :

Traductions intermédiales :

On pourra aborder la question de la traduction, comprise dans une acception large, qui renverra à la fois à la contextualisation des traductions d’une même œuvre d’une langue à une autre, et à des pratiques de « traduction intersémiotique », selon les termes de Roman Jakobson (« Aspects linguistiques de la traduction » (1959), Essais de linguistique générale, trad. Nicolas Ruwet, Paris, Minuit, 1963, p. 79), par lesquelles un artiste cherche à créer un équivalent d’une œuvre dans un autre système de signes ou d’une forme à une autre (de la tragédie vers la tragédie lyrique, par exemple). Cette approche de la traduction, qui invite à confronter traduction « interlinguale » (de langue à langue) et traduction intermédiale, a également été initiée par George Steiner qui, dans Après Babel (George Steiner, After Babel, Aspects of Language and Translation, London, Oxford UP, 1975), souligne la proximité des enjeux de ces deux pratiques.

Une autre direction possible est l’étude des diverses manifestations d’un mythe à travers le temps et les aires géographiques et culturelles, dans un même medium (littérature, cinéma, musique) ou d’un medium à un autre.

Projets 2024 :

  • Nathalie Bragantini-Maillard et  Jean-Jacques Vincensini, Jean Renart, L’Escoufle, roman idyllique du temps de Philippe Auguste, Paris, Honoré Champion, coll. « Champion classiques », 2024.
  • Françoise Laurent, édition et traduction des Miracles de Notre Dame, Paris, Honoré Champion, 2024.

Intermédialité : la littérature et les arts :

Les recherches menées pourront également se concentrer sur les rapports entre littérature et arts (architecture, cinéma, peinture, musique, sculpture, danse, théâtre, bande dessinée). On pourra, dans cette perspective, analyser la coexistence de différents mediums au sein d’une même œuvre ; il sera également possible de travailler de façon métacritique sur l’évolution des discours autour des spécificités de chaque medium et de la pratique de la traduction intermédiale (est-il possible de tout traduire en musique, en peinture, au cinéma, etc. ?).
 

Interactivités intermédiales :

Un autre champ d’études pourra être consacré à la conception d’une œuvre destinée à être perçue et / ou diffusée à travers différents mediums simultanément. Des exemples pris dans la création contemporaine montrent en effet que de nombreuses œuvres existent par la mise en place de contenus sur des supports textuels, visuels et numériques. Ce phénomène étudié par Henry Jenkins (Convergence Culture—Where Old and New Media Collide, NY, New York University Press, 2008) met en jeu des interactions entre les mediums qui produisent des effets de sens de façon novatrice.

L’ensemble de ces pistes de recherche pourra être décliné pour aborder soit des corpus déjà constitués (dans le cas des adaptations ou dans le cas des comparaisons intermédiales) soit des corpus en cours de construction faisant appel à des supports peu étudiés jusqu’à présent (littérature publiée en ligne, contenu interactif de certaines œuvres contemporaines). Les travaux de Linda Hutcheon (Theory of Adaptation, London, Routledge, 2012) ont montré l’émergence d’une création fondée sur ce principe d’interactivité et d’influence réciproque des supports ; il s’agira donc d’une dimension tout à fait pertinente pour l’étude de l’intermédialité.

Intermédialités et interactions sociales :

Au-delà de l’interaction entre les supports d’expression artistique, l’approche de l’intermédialité pourra également se décliner selon une dimension d’interaction sociale, qui présuppose une contextualisation historique, sociale et parfois politique des phénomènes de transferts d’un mode d’expression vers un autre. Cette dimension est susceptible d’être abordée de façon diachronique en tenant compte des variations de la perception des media dans la société au cours de l’histoire. Dans une perspective qui est celle de la réception, l’étude des transferts culturels pourra ainsi se conjuguer avec celle des transferts artistiques.